Kiyé's Garden / Snake bean flower
Arrivée dans la nuit, après un déluge dantesque, d'où s'ensuivit une fraîcheur de l'air de pur délice, une fleur de haricot serpent. Un jardin sous les tropiques compose avec des excès de précipitation en été, de chaleur à la saison sèche, de splendeur dans ses manifestations, de dévastation diverses et de miracles que la croyance universelle prête à la nature. Nous passerons vite sur les visites de serpents — jusque sur le rebord de la fenêtre de votre chambre, me dit une beauté française qui n'avait pas l'air de plaisanter —, car nous en avons une phobie, préférant nous attarder sur le plaisir de semer et planter tous les jours de l'année, plaisir d'autant plus grand en hiver d'ici pour qui a connu l'hiver de France, et qui fait des paysans français de véritables héros... En moins d'un mois, voici notre serpent haricot exhibant deux fleurs aux allures d'orchidées, si belles qu'on en oublie qu'elles vont serpentifier en fruits longilignes approchant les cinquante centimètres, haricots sans fil, croquants, servis comme crudité parmi d'autres fleurs, fruits et feuilles du jardin, le concombre, l'aubergine verte de la taille d'une tomate cerise, le concombre amer, la mangue verte, l'oignon tige, le basilic thaï, la menthe, l'ail, le poivre en grappes, le piment, la fleur de Virginie, les pousses de courge éponge... je n'en oublie pas mais arrête là cette liste qui n'a pas plus de frontières que que le temps n'a de fin, quand bien même on s'accorde à dire qu'il a eu un début, point sur lequel je me garderai bien de me prononcer. Loin de ces considérations qui animent mon esprit, Mèe Ban, à qui j'ai demandé si les fleurs des haricots serpents se mangeaient, me répondit que non, et je crus comprendre que c'était pour la raison que, si on mangeait les fleurs, on ne pourrait pas avoir de haricots. J'apprends donc chaque jour, étant acquis que pour apprendre il faut poser des questions.
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