La tête de la dame
C'est ma montagne Sainte-Victoire, portant nom enfantin de "Tête de la dame", distraite assurément car dans les nuages, d'humeur changeante, imprévisible dans ses sautes du beau à l'orage, du calme à la tempête, du chaud au froid. Je la vois tous les jours par la fenêtre de mon salon bureau salle à manger studio atelier, sauf quand le ciel est bas. Alors, le paysage écrêté devient bourguignon ou toscan, tout en courbes et pentes douces. Un jour, je gravirai la tête de la dame, il faut pour cela une envie détachée de toute idée de faire du sport, une fantaisie de type Gulliver, quelque chose comme séduire le monde. Je ne sais pas si, de là-haut, on peut voir la mer, mais si le temps est au clair, il est certain qu'on peut voir le Ventoux, au sommet duquel Pétrarque assurait avoir vu la mer. Il est probable que je ne verrai pas ma maison, parce que les lois de la perspective ne sauraient le permettre ; je distinguerai l'emplacement de mon village, la ligne de la route, le vide de la vallée. Et, chose plus belle encore, je verrai dans toutes les directions, par-dessus les sommets qui m'entourent, le plateau du Vercors, les vallées du Crestois et du Diois, les monts de l'Ardèche vers l'Occident, les Alpes vers l'Orient, et ses premiers contreforts que sont les Ecrins, le Dévoluy, les Bauges. Plus loin, la Suisse, l'Italie, et, qui sait, Istambul, Téhéran, Lahore, New Dehli... Oui, il n'y a que deux pays, l'Iran et le Pakistan, entre la Turquie et l'Inde. Et un seul pays, la Birmanie, entre l'Inde et le Laos. Autrement dit, voilà pourquoi j'irai un jour visiter la Turquie. Là-bas, je serai à quatre pays de ma terre natale.
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